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Sarah Marie Day, fondatrice du magazine digital éco-responsable Luméra Mag

Rencontre avec sarah, styliste de mode et journaliste basée à New York, fondatrice de la plateforme de mode durable en ligne luméra mag. Elle nous parle de son expérience et de son parcours vers une mode plus responsable et nous fait part de ses endroits préférés dans la ville qui ne dort jamais.

Quelle est la genèse de Luméra Mag ?

De manière très inattendue, j'ai accompagné mon mari, Andrew Day, qui est photographe, pour un photoshoot à Spring Place pendant la fashion week en 2019 et je suis tombée par hasard sur une table ronde à propos de la mode durable, animée par Dana Thomas, qui interviewait Amber Valetta, Philip Lim et le doyen de Parsons.

J'avais appris les problèmes de pollution liés à l'industrie de la mode à l'université, mais je n'avais jamais vraiment été attirée par le sujet parce qu'on en parlait toujours d'une manière plutôt négative et fataliste. Dans cette discussion, ils ont abordé des solutions, ce que j'ai trouvé très inspirant.

C'était tellement inspirant que j'ai ensuite commencé à m'intéresser aux marques de slow fashion et aux solutions existantes. Je me suis rendu compte qu'il n'y avait pas vraiment de lieu qui rassemblait ces solutions plus responsables - il n'y avait pas de destination qui nous montrait, par exemple, « voici 15 marques éco-responsables à suivre ».

L'idée initiale était donc de créer un espace où, en tant que consommateur, vous pouvez trouver ces solutions de mode durable très facilement afin de prendre de meilleures décisions d'achat et d'y avoir facilement accès. C'est de là que vient le nom Luméra, « lumen » de la lumière, comme un coup de projecteur sur ces solutions, sur ces marques, sur ces plateformes de location, et de les mettre en lumière.

J'ai ressenti le besoin d'en parler et ma propre consommation a changé. J'ai arrêté d'acheter des articles de fast fashion, même des marques de milieu de gamme comme Maje par exemple. Au début de la vingtaine, on délaisse Zara et COS et on peut s'offrir d'autres marques plus premium, mais quand on y regarde de plus près, ce sont les mêmes tissus, les mêmes usines, juste un marketing différent. C'est très dérangeant.

J'ai commencé à revendre beaucoup de pièces de ma garde robe, car lorsque j'ai commencé à m'intéresser à la qualité et aux tissus, je n’appréciais plus les vêtements que j’avais pu acheter dans le passé. Par ailleurs, j'avais étudié le stylisme, ce qui allait de pair. J'apprenais la composition des tissus, toutes ces choses, et j'étais donc capable de reconnaître la qualité. Lorsque j'ai arrêté d'acheter des vêtements Zara, c'était vraiment très facile ! Je me souviens que quelques semaines plus tard, je retournais dans un magasin Zara et je me disais que ces vêtements ne m'intéressaient plus. Je vois que les tissus ne sont pas qualitatifs, je vois tout le polyester, je vois que les finitions ne sont pas bonnes, et je sais que ça ne va pas tenir longtemps.

Il m'a fallu un certain temps pour trouver un bon nombre de marques de slow fashion avec lesquelles j'avais l'impression de pouvoir obtenir la même esthétique de manière durable. J'aime la mode, j'aime m'habiller, j'aime les tissus, j'aime tout cet univers ! C’est important pour moi de pouvoir exprimer mon style mais d’une manière plus durable. Trouver un moyen de s'habiller de manière élégante, chic, sans effort - sans acheter des pièces fast fashion - a demandé beaucoup de recherches pour trouver des alternatives. Je me suis rendu compte que certaines pièces sont beaucoup plus difficiles à trouver - trouver des marques de chaussures éco-responsables, par exemple, est assez difficile.

Comment as-tu développé tes connaissances sur le développement durable ?

Après la table ronde, j'ai acheté le livre « Fashionopolis » de l'animatrice, qui m'a beaucoup appris. J'ai également lu « The Conscious Closet » d'Elizabeth Cline, qui se concentre vraiment sur la manière de créer une garde-robe durable.
J'ai aussi regardé beaucoup de documentaires comme « The True Cost » et des vidéos sur Youtube.
Une grande partie de mon éducation s'est également faite en faisant de la recherche à l'université. J'ai étudié le stylisme à Paris, puis le journalisme de mode en Allemagne, et nous avions de nombreux sujets sur le développement durable, ce qui m'a beaucoup appris en rédigeant des travaux pour l'université. J'ai également écrit mon mémoire de licence sur ce sujet.

Quelles sont les prochaines étapes pour Luméra Mag ?

Nous venons de refaire le site web avec un nouveau répertoire de marques pour faciliter la recherche de bonnes marques en un coup d'œil et nous ajoutons maintenant une nouvelle marque par mois. L'objectif est de présenter à nos lecteurs une grande sélection de marques et de raconter leurs histoires ! Comme nous l'avons fait dans notre interview de facettes studio. L'élargissement de l'annuaire des marques est un sujet important, pour inclure plus de marques masculines et nous pensons l'étendre aux catégories beauté et maison.

Notre équipe éditoriale pense également à un podcast pour avoir des conversations avec des personnes qui sont dans l'univers de la mode durable.

Quelle est ton approche pour t’habiller ?

Je suis pour l'investissement dans des pièces de qualité, c'est vraiment mon approche vestimentaire : moins et mieux, la qualité plutôt que la quantité, et aimer les pièces que l'on a.

Je pense que j'achète beaucoup de basiques élégants que l'on peut mélanger et assortir les uns aux autres. Ma palette de couleurs comprend davantage de tons neutres : bleu foncé, rouge, blanc, beige - des couleurs que l'on peut facilement combiner entre elles. Mais j'essaie aussi de la rendre plus intéressante en choisissant des pièces plus élégantes, avec des finitions ou des détails intéressants. Et j'évite les matières synthétiques. Je recherche des pièces spéciales qui vous feront vous sentir bien lorsque vous les porterez.

Quelles pièces portes-tu le plus souvent ?

J'aime mélanger les styles féminin et masculin, c'est comme ça que je me sens le plus à l'aise. J'aime les pièces ajustées qui sont traditionnellement des pièces masculines, comme un costume ou un gilet bien taillé - c'est pour cela que j'aime ta marque ! J'aime les associer à des pièces plus féminines, comme une robe ou une jupe en soie, ou un joli caraco en soie. J'aime mélanger des matières douces et féminines avec des vêtements masculins et pointus. Je pense que c'est le contraste qui rend une tenue intéressante.

Comment aimes-tu porter tes blazers ?

J'essaie d'obtenir un style chic sans effort en portant un blazer oversize sur une robe en soie ou sur une mini-robe, de sorte que le blazer soit plus long que la robe - je pense que c'est assez intéressant. Je porte aussi souvent un blazer avec des pièces classiques, comme un t-shirt, un débardeur ou tout ce qui est en jean, pour créer un contraste entre le BCBG et la décontraction.

"Je suis pour l'investissement dans des pièces de qualité, c'est vraiment mon approche vestimentaire : moins et mieux, la qualité plutôt que la quantité, et aimer les pièces que l'on a."

En tant qu’Allemande, comment le fait de vivre à New York influence ton style?

En Allemagne, tout le monde s'habille de la même façon, je dirais, ce n'est pas aussi créatif que ce que l'on peut voir à Paris, New York ou Londres. Le fait d'avoir vécu dans des villes comme Paris ou New York au cours de ma vingtaine m'a rapprochée de mon propre style, car j'ai l'impression de pouvoir porter ce que je veux. On peut davantage exprimer sa personnalité à travers son style sans que les autres ne sourcillent. En fait, en vivant à New York, je peux vraiment exprimer mon style personnel.

Un conseil pour prendre soin de ses vêtements?

Il y a trois choses que je peux recommander à tout le monde : un rouleau adhésif, un rasoir électrique (j'utilise celui de la société suédoise Steamery) et un défroisseur ou un fer à repasser. Dans cet ordre. Je recommande également de toujours vérifier les étiquettes, car les fabricants vous indiquent comment prendre soin de vos vêtements. Veillez à ne pas laver ni repasser certains tissus à une température trop élevée. Il est également très utile d'avoir un bon pressing et un bon tailleur ! Il faut en essayer des différents dans votre quartier ou en demandant à vos amis et à votre famille de vous recommander des adresses locales. Parfois, nous ne portons pas nos vêtements parce qu'ils ont besoin de petites retouches, comme un ourlet trop long ou une taille pas assez serrée, et ces choses peuvent être réparées très facilement !

La pièce que tu portes le plus souvent?

J'ai toujours froid, donc je porte souvent des pulls en cachemire. Une marque durable que j'adore, mycashmere, fabrique de magnifiques cachemires durables et recyclés.

Ton style en 3 mots

Classique, intemporel, minimaliste.

Quelle est la pièce dont l’investissement en valait la peine?

Ma montre Cartier que je porte tous les jours. Ma mère me l'a offerte et je l'aime tellement. C'est certainement une pièce que j'offrirai un jour à ma fille. Je pense que tout ce que vous possédez et que vous aimez tellement que vous voulez le donner à la génération suivante vaut la peine d'être investi. Par exemple, j'ai une robe de ma mère, une petite robe noire Dolce & Gabbana qu'elle a portée pour son 30e anniversaire. Je vais pouvoir porter la même robe pour mon 30e anniversaire, c'est la beauté d'acheter des choses de qualité.

Les coups de cœur de sarah à new york :

Un endroit vintage à New York

Chickee's vintage à Williamsburg, elle a une belle collection de pièces originales.
Au coin de la rue, il y a Mirth Vintage, excellent pour les basiques élégants. La propriétaire s'approvisionne dans le nord de l'État de New York, d'où elle est originaire. J'ai d'ailleurs écrit un article sur les meilleurs endroits vintage de new york.

Un café à New York

Je suis l'une des rares personnes à préférer le thé au café. L'un de mes endroits préférés est Kettl, dont j'adore l'emplacement à Brooklyn. C'est une maison de thé japonaise très authentique où ils fabriquent même leur propre poudre de matcha, le thé est tellement bon. J'y ai appris beaucoup de choses sur le thé japonais, ils proposent également des cours.

Un bar à New York

Il y a un endroit mignon dans le West Village qui s'appelle Bar Pisellino, c'est un café et un bar italiens. C'est un petit coin de rue, il est agréable de s'asseoir sur la terrasse le soir avec des amis. C'est très décontracté, quand je retrouve un ami pour boire un verre, c'est le plus souvent là, surtout en été.

Un musée à New York

J'adore le MET, leurs expositions mode sont toujours très bien organisées. Je me souviens encore d'y être allée pour la première fois pour voir « China Through the Looking Glass ». C'était une très belle exposition, l'une de celles où l'on oublie le temps et l'espace.

Une chanson qui te donne la pêche?

« come and get your love » de Redbone - j'aime les vieux classiques. En ce moment, j'écoute aussi « misses » de Dominic Fike, elle est sympa aussi.

Sarah porte l'ensemble gilet et pantalon en lin noir.